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- Le marché du « bonheur » : développement personnel et nouvelles spiritualités
publié le 23/12/2023 Par Olivier Berruyer
Chaîne Youtube Élucid
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Thierry JOBARD est essayiste et libraire. Responsable du rayon Sciences humaines d'une grande librairie à Strasbourg, il est dans une position particulièrement privilégiée pour observer la croissance vertigineuse des livres consacrés au développement personnel et aux nouvelles croyances. Il est l'auteur de « Contre le développement personnel » et « Je crois donc je suis » (ed. Rue de l'échiquier).
*[En septembre 2024, il a publié "Croire en soi" que je viens de lire.
Comment construire son identité à l'ère des réseaux sociaux et du développement personnel ]
Dans cette interview par Olivier Berruyer pour Élucid, Thierry Jobard montre à quel point le marché du bonheur (déclassé en « bien être ») a explosé en diffusant largement des idées biaisées, détournant toute l'histoire des croyances et de la philosophie au profit de recettes managériales propres à épouser ce que le capitalisme fait de pire aux individus. Plus question de s'intéresser au collectif, plus question de chercher la transcendance : la réalisation de soi passerait désormais par la recherche d'un « moi authentique », imaginaire et aseptisé, qui loin de garantir le bonheur, isole et épuise les individus...
***-***
Perso, je remarque de plus en plus que les gens perdus dans leur recherche d'aide en psychiatrie, se tournent parfois vers des "remèdes" alternatifs ou des gourous qui les incitent à arrêter leurs traitements pour atteindre le nirvana...
Je m'insurge également contre les fervents "believers" de la "résilience"! C'est un terme très souvent utilisé dans les théories du développement personnel ! Il faut être positif, résistant, aller de l'avant, innover, croire en soi, tenir bon envers et contre tout...
Ça fiche la pression tout ça, n'est-ce-pas ?
Définition de la résilience :
Capacité à SURmonter les chocs traumatiques ;
Aptitude d'un individu à se construire et à vivre de manière satisfaisante en dépit de circonstances traumatiques.
Et ça rejoint le développement personnel !
Être un battant, abandonner toutes les idées négatives et les reformuler en pensées positives...
En santé mentale, on parle beaucoup de "rétablissement," ! C'est devenu le maître-mot. Et ça passe par plein de phases dont l'acceptation de son trouble psychique, la psychothérapie, la psychoéducation, la compliance aux traitements, l'alimentation saine, les activités physiques, les activités créatives et culturelles, la participation à des activités organisées par des GEM, des Clubhouses.
Bien sûr, je ne dénigre pas tout ce qu'on peut mettre en place pour se rétablir et à cet égard, La Maison Perchée dans le 11e arrondissement à Paris, en est un bel exemple, mais ce qui me gêne dans tout ça, ce sont les injonctions à faire ceci ou cela pour s'"améliorer" et ainsi gommer les "aspérités"...
"Se conformer"...
Ok j'ai un trouble psy mais j'ai aussi des capacités qui me permettent de voir le monde sous un angle différent et c'est tant mieux ! 😉
Je ne peux que plussoyer.
Le développement personnel, ce n'est jamais que le poisson rouge qui fait un tour complet de son bocal pour revenir au point de départ. L'individu qui est son propre début et sa propre fin, son propre horizon.
Il n'est pas seul, mais seul face à celui qui le fait tourner dans son bocal, et qui en est donc "tout puissant".
J'avais senti cette espèce de tyrannie du mélioratif, mais en relisant tes propos cela me semble plus évident encore et c'est bien dans le courant de ce qui baigne notre inconscient collectif.
J'invite les plus sceptiques à faire un tour dans leur grande librairie de chaîne locale (je ne ferai pas de pub) où ils pourront "s'émerveiller" de la taille de ce rayon et acquérir pour un modeste prix bougie parfumée, pierre magique ou médaillon positif.
La faille (devrais-je dire le gouffre) du développement personnel, c'est qu'il ignore volontairement l'influence sociale, sociétale et environnementale sur le bien-être individuel, en rendant responsable l'individu lui-même de son propre bonheur. C'est un peu comme dire à un type qu'on a poussé à l'eau au milieu d'un fleuve à fort courant qu'il n'a qu'à se mettre en position de méditation zen pour éviter de se noyer.
Loin de moi l'idée de nier l'influence du spirituel sur le physique. Je pense d'ailleurs que l'effet placebo (et son inverse, l'effet nocebo) ne sont pas suffisamment étudiés, et que l'on peut, réellement, utiliser son esprit pour se sentir mieux... dans certaines circonstances, lorsque notre bonheur dépend réellement de notre état d'esprit, ou que nous avons besoin de nous renforcer contre des aléas de la vie.
Cela ne signifie pas pour autant qu'on peut se guérir avec des séances à 100€ la minute, ou en rejoignant l'église des saints pizzaïolos de la marée montante. Je crois donc qu'il faut appliquer le principe de défiance devant toute "technique du bonheur".
Just my 2 € cents...
Salut. 🙂
Très interessant sujet, même si je n'ai sciemment pas regardé la vidéo jusqu'au bout. Juste environ 5 minutes, pas plus. (car c'est un sujet que je connais assez bien, à la base, et donc, je n'y apprends plus rien du tout.)
Juste à partager deux choses: Le marché du bonheur personnel est en train d'être en perte de vitesse depuis dix ans, dans l'hexagone. Et une partie de son revival est en train de se faire insidieusement par la voie Mascu qui, à base de tarifs qui démarrent des fois "innocemment" à partir de 300 euros (pour aller jusqu'à des 3000!) est en train de tromper des tas de gars qui en sont réduits à troquer leurs difficultés relationnelles intra-genre hétéro (c'est-à-dire: entre hommes (zones conflictuelles et/ou conccurentielle) et leurs autres difficultés passionnelles extra-genre (c'est-à-dire: en regard des femmes (zones séduction, affection, reconnaissance, etc...) tout simplement contre de la haine. 🙄 Ainsi, nombres de "prophètes" du retour à la virilité-en-force auraient bien pu préalablement s'orienter vers d'autres publics, si éventuellement, ce business model n'était en repli vers des niches très spécifiques. Bref, un bel effet d'opportunisme. 😒
Autre truc (un peu décalé et d'ordre plus généraliste, celui-ci), admettons que, demain, une loi passe pour obliger à une certaine forme de gratuité de cet espace de vente de services et d'aide par coaching, pensez bien qu'alors le marché imploserait rapidement sur lui-même et nombre de sauveurs/euses s'en iraient tenter de faire fortune ailleurs et autrement. Bref, il est là le point de faiblesse dans le blindage!! Ce système ne se tient et ne continue malgré tout à prospérer un peu - par poussées cycliques - que parce que c'est légal et commercialement admis dans les moeurs. Si effectivement demain, une gratuité théorique passait sur le devant de la scène, ne restaient alors en lice que quelques rares illuminé(e)s, Mères Thérésa et autres "Jesus" bienfaiteurs qui tenteraient de sauver le Monde à leur manière en allant peut-être paradoxalement jusqu'à se dépouiller de tout par amour véritable de son/sa prochain/ne. Pour le reste, dans les allées des immenses salons dédiés au coaching personnel, ça serait alors le grand désert.................... Crroâââ, Crroâââ, Crroâââ, Crroâââ... Pffffffffffffffffffffff... frool, frool, frool... [<<< tentative de bruitage - assez amateur - de cris de corbeaux, du vent traversier qui souffle sur la plaine et de pelotes d'herbés qui roulent aléaloirement sous l'effet de ce même vent. Image mentale! 😋)
Hiné.
Le marché du "bonheur" est un marché. Comme celui de l'art. Et pour travailler dans ce dernier, je peux vous attester qu'on y rencontre plus de commerçants que de marchands, plus d'opportumistes égotiques et vénales que d'artistes sincères et honnêtes. Et que depuis bien longtemps, les prix sont décorellés de la valeur des choses et de la valeur travail...
Mais je peux aussi vous garantir que dans ces deux marchés, il ya aussi des Artistes au sens noble du terme. Des gens qui oeuvrent de tout leur coeur et de toute leur âme à servir quelque-chose qui les dépasse et les transcende. Ce ne sont pas forcément ceux qui font le plus de bruit, ce ne sont pas ceux qui font le plus de ventes, mais ce sont ceux qui font le plus de bien.
Ceux-là ne méritent ni l'arrogance ni le mépris, mais une reconnaissance juste de ce qu'ils invitent, justement à penser en dehors du bocal des injonctions, des a priori et du confort rassurant des certitudes et des cervitudes... C'est dérangeant, c'est pénible, c'est douloureux mais quand on est secoué (et pas brusqué) par les bonnes personnes, c'est salutaire...
Gare à ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain...
@MARead
Pour ce qui me concerne, je revendique le droit d'être malheureux. Cela me permet de bien plus apprécier les moments ou je ne le suis plus.
J'ai vécu un bonne partie de ma vie avec une personne bipôlaire, avec de moments terribles mais aussi des moments merveilleux.
Et si si tout cela s'est mal fini je ne regrette rien ( je ne regrette jamais rien). Cette personne m'a fait plus de bien que de mal. Elle m'a fait grandir, voir le monde différemment.
Alors pas besoin de marchands de bonheur. La seule chose qui me révolte, c'est l'état de délabrement des services psychiatriques de notre pays.
La folie, c'est de ne pas prendre soin de nos fous
Je remonte ce post pour la sensibilisation et.... la perception intelligente et logique des avis données.
Quand le meilleur côtoie le pire que faire ?
Tout jeter ?!
De mon point de vue, tant que la pluralité de cette appelation poubelle "développement personnel", ne sera pas exploitée par des cabinets internationaux mais resteront dans le domaine " artisanales" ou de la "PME", je dirais, ne faites rien de cet effet de mode, il est concomitant à l'effondrement sociétal des repères et des valeurs qui a court en occident.
Mettre en garde c'est bien mais il ne faudrait pas être tenté par des solutions qui pourraient êtres bien pire que le "mal".
@paradox
Changer de civilisation !
Faire élaborer par des philosophes, anthropologues, sociologues, soignants, pédagogues, psychologues, ethnologues, historiens une sorte de livre blanc, une charte, un guide qui ennoncerait des points de vigilance lié à l'éthique pour ces pratiques non conventionnelles ? Que ce soit en terme de bien-être, d'efficacité pro, de recherche d'âme soeur, de santé, de spiritualité et tout et tout.
Mais par les temps qui courent, surtout pas de loi ou d'encadrement autoritaire.
S'il y avait une recette...
(C'est ça... surtout ni loi, ni hiérarchie... Il n'y a que des gens qui veulent controler les autres qui ont besoin de lois !)
Toutes les "bonnes idées" et tous les "bons discours" ont été détournés, retournés, falsifiés, vidés de leur substance, quelle que soit la "qualité" (au sens de valeur comme au sens de qualification) de leur concepteur. C'est d'ailleurs le parangon de ce qu'on vit aujourd'hui. Il n'y a qu'à voir ce qui est fait au nom de la "liberté d'expression".
@Matty-san
En fait, tu n'as pas répondu à ma question. Elle ne portait pas sur les solutions que tu envisages (intéressantes au demeurant) mais sur :
"des solutions qui pourraient être bien pire que le "mal". "
Du coup, quelles solutions trouves-tu pire que le mal ?
@Etoile
"(ni loi, ni hiérarchie... Il n'y a que des gens qui veulent controler les autres qui ont besoin de lois !)
Je ne suis pas d'accord. Je reste persuader que quand il n'y a pas de loi, il est au contraire évident que certains peuvent contrôler les autres. Car quand il n'y pas de lois établies ensemble, des règles tacites se mettent en place d'elles-mêmes, et c'est souvent pas cool.
D'ailleurs, une grande partie de la classe dominante, pour aggrandir leur contrôle pour mieux dominer, mettent le paquet pour déréguler le marché.
Des lois peuvent justement permettre de préserver une organisation horizontale, sans hiérarchie. C'est ce qu'on dit ensemble et qui est consenti qui commande.
Je ne poste pas ça ici parce que ce n'est pas le sujet mais la chaîne Lundi Matin vient de poster une interview d'un juriste anarchiste. Je recommande. Il vient de sortir un livre : Vers de nouvelles utopies concrètes ( ed. Garnier).
D'un autre côté, peut-être est-ce justement lié au sujet puisque pour moi, le bien-être est lié à la fin de l'économie de marché.
"Peut-on être juristes et anarchistes ou faut-il partir du principe que le droit est toujours « bourgeois » ? Qu'il est quoi qu'il arrive la cristalisation et l'expression des rapports sociaux dominants ? C'est quoi d'ailleurs « le droit » ? Des lois, des normes, des décrets, des titres, des constitutions, des règlements, des contrats... Quand on y pense, c'est un peu tout et n'importe quoi mais c'est ce qui trame plus ou moins visiblement nos existences communes et personnelles, c'est ce qui fait tenir cette fiction bien réelle : « la société ». Les juristes anarchistes que nous recevons cette semaine font le pari de penser le droit par-delà et en-deçà de l'État, pour cela ils ouvrent simultanément deux questions d'apparence paradoxales : comment trouver dans le droit des ressources pour se défendre contre l'ordre des choses ? Comment préfigurer depuis le droit ce que pourrait être une organisation sociale anarchiste, consentie, libre ? Leur premier livre qui vient de paraître s'intitule d'ailleurs : Vers de nouvelles utopies concrètes."
Paradox,
Moi je prends le truc de "pas de loi nécessaire" dans l'autre sens...
Un être qui a réalisé un semblant d'évolution, de travail sur soi, et acquis un minimum d'empathie n'a pas besoin de lois, pour se respecter soi ou respecter les autres.
Un être qui a accompli encore plus de chemin sur cette voie n'a pas besoin de loi, et encore moins de morale.
Evidemment, par les temps qui courrent, c'est plutôt l'inverse qui se produit. Et la loi a normalement pour but de "protéger" les faibles contre les abus des forts dans un rapport de force. Pas pour rien, comme tu le dis si bien, que les allumés du moment veulent déréguler à tout va (jusqu'à supprimer les notions de démocratie ou d'état).
citation :
Un être qui a réalisé un semblant d'évolution, de travail sur soi, et acquis un minimum d'empathie n'a pas besoin de lois, pour se respecter soi ou respecter les autres.
💚
@Alcedo
"Un être qui a réalisé un semblant d'évolution, de travail sur soi, et acquis un minimum d'empathie n'a pas besoin de lois, pour se respecter soi ou respecter les autres."
Oui, évidemment. Mais une personne sur combien ? 10 000, 100 000, 1 M ?
Ou alors quoi ? On zigouille tous ceux qui l'ont pas fait comme ça on est tranquille ? On crée une secte en dehors du monde ?
Ça amène vite à l'élitisme, tout ça.
Mais surtout, je parle de fonctionnement ensemble. L'absence de structure mène à la tyrannie.
Et pour structurer, il faut se parler et se mettre d'accord. Je ne parle que de ça, se mettre d'accord sur comment on fonctionne ensemble. Se parler et décider ensemble. Ça s'appelle créer des règles. Qui peuvent toujours être discutées et remise en question.
Même si on se respecte tous dans le monde des bisounours, faut bien se mettre d'accord. Justement parce qu'on se respecte, je dirais.
Règle numéro 1 : personne ne me réveille avant 10h du mat sauf cas d'urgence. Ne pas respecter cette règle, c'est ne pas me respecter.
C'est aussi se respecter soi que de tenir parole. Et c'est respecter les autres que de respecter ce qu'on a dit ensemble.
Mais bon, c'est sûr, mieux vaut ne pas se parler et que chacun n'en fasse qu'à sa tête.
(( Petite réflexion stupide et hors sujet de ma part :
Comment se déplacer, sans risques , à pieds, à cheval ou en voiture sans Code de la route ? ...
Sc'usez ... Question ridicule de ma part, puisqu'il n'y a pas de route au pays des Bisounours ! ))
@paradox
Pour faire court, tout ce qui de près ou de loin tenterai de légiférer pour interdire, obliger, encadrer.
Bah oui Gilde, tu ne sais pas encore marcher sur des arc-en-ciel ? 😋
Il ne faut pas tout mélanger quand même. Pas de loi ne veut pas dire qu'il n'y a pas de règles de fonctionnement.
Les lois sont là pour interdire, contrôler. Nous n'avons pas besoin de ça pour bien nous comporter. Nous n'avons pas besoin d'un état "parent" qui nous dise ce qu'il faut faire ou pas.
@Etoile Oui, c'est exactement de ça que je parle.
En fait, on est d'accord, encore une histoire de se mettre d'accord sur la définition des mots.
Pour moi, les lois étatiques sont des règles de fonctionnement de la nation. Ce ne sont pas que des interdits.
Et dans les règles de fonctionnement autour de nous, entre gens qui décident de faire ensemble, il peut y avoir des interdits.
La différence, c'est que ces interdits, il ne viennent pas de haut mais un commun accord.
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