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- Déterminisme social
Quelle influence joue la condition sociale pendant l'éducation sur l'exploitation du potentiel ? Un enfant de bobo ou d'aristo a-t-il plus de chance d'y parvenir qu'un enfant de prolo ?
En ayant à l'esprit qu'on inculque à l'un qu'il sera partout à sa place, et à l'autre qu'il devra partout rester à sa place.
Je pense qu'il s'agit là d'un phénomène commun, quel que soit le mode de pensée. Le milieu social est un facteur déterminant. La manière dont on peut se sortir d'un milieu défavorable est en revanche un phénomène individuel, pour les parents et pour l'enfant. Si l'on a la chance d'avoir des parents (même normaux) qui aident à développer un potentiel, on ira mieux que si ce n'est pas le cas, de mon point de vue.
Je suis issu d'un milieu pauvre. Très jeune, ma grand'mère m'a éveillé à la lecture et au calcul, ce qui m'a permis d'avoir les bases de la lecture et des chiffres en entrant à la maternelle. Elle et ma mère m'ont toujours parlé comme à un adulte, et je me suis donc toujours comporté comme tel. Et elles ont su me laisser poser les milliers de questions qui me traversaient la tête, et y répondre du mieux qu'elles pouvaient. J'ai donc eu cette chance-là, même si elles n'étaient pas surdouées. Et en me comparant aux autres enfants, j'ai vu par moi-même quelles étaient mes différences et j'ai appris à faire avec (sans pour autant les considérer comme un handicap) :)
Influences variées donc : le milieu d'origine, le milieu familial et sa propre nature profonde, je dirais...
La condition sociale, pour moi, a deux principales composantes, les ressources matérielles, et les ressources intellectuelles. Les premières compensent (trop souvent) les secondes : certains seront PDG parce que Papa l'était, même s'ils sont idiots. A l'inverse, il n'est pas forcément impossible (mais beaucoup plus difficile) de compenser totalement l'absence de ressources matérielles par les ressources intellectuelles.
J'ai, de mon côté, vécu un peu l'inverse de Merlin : ma mère était HP (jamais testée, mais j'en suis sûre à 99%), études arrêtées du jour au lendemain (classe de 1ère) pour aller bosser et contribuer aux finances de la famille et notamment à nourrir le neveu qui venait de naître, et entre cette frustration et un syndrome de l'imposteur très très très présent, elle n'a jamais été suffisamment stimulante : quand je réussissais, c'était "normal", je n'ai pas appris à lire en avance ni quoi que ce soit, et je sais, parce qu'elle me l'a dit quand j'avais 8 ans, qu'elle aurait refusé un saut de classe s'il m'avait été proposé (ça ne l'a pas été cette année-là, j'ignore si ça l'a été à un autre moment de ma scolarité). Son mot d'ordre, c'était juste "être dans la norme, ne pas se faire remarquer, même en bien".
Du coup, mon déterminisme à moi, c'est un syndrome de l'imposteur encore plus ancré que celui de ma mère, et une ambition qui n'a jamais dépassé les limites de mon crâne, et a encore bien du mal à le faire aujourd'hui. L'envie est là, les idées de projets aussi, mais l'auto-censure est plus forte.
J'avais déjà entendu parler aussi (mon cerveau l'associe à Bourdieu, mais je peux me planter totalement) d'une forme d'auto-censure par loyauté à son milieu d'origine. Malgré des conditions matérielles et intellectuelles réunies, les gens auraient (dans une proportion que j'ai oubliée) tendance à ne pas vouloir s'élever plus d'un degré au-dessus de la condition de leurs parents, par peur de les trahir. Je suis incapable de savoir si j'ai "subi" ce phénomène.
Cette forme d'auto-censure par loyauté à son milieu d'origine est une idée très intéressante ; je ne la connaissais pas et pourtant elle ne me surprend pas, comme l'impression de l'avoir toujours devinée sans l'avoir formulée. Cela me permet d'apporter une pièce au puzzle. Merci Fanny-146 !
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